mercredi 12 septembre 2018

182*


J'ai toujours été persuadée que j'adorais voyager. C'était une certitude que j'avais ancrée au plus profond de moi. Et mon plus grand regret a longtemps été de ne pas être une grande voyageuse.

Nous ne partions pas en vacances avec mes parents. Mon père était marin de commerce, et je crois que mettre de l'argent de côté pour partir en vacances ne faisait pas partie de leurs planifications. Nous avons fait quelques "déplacements", en famille, en France, mais cela fut exceptionnel. Par contre, mes frères et soeurs et moi ne rations aucun voyage scolaire.

L'été de l'obtention de mon bac, j'ai eu l'opportunité de partir comme jeune fille au pair à Brighton, en Angleterre. C'est un ancien professeur d'anglais qui m'avait trouvé une place. Mes parents s'y sont opposés. Deux ans plus tard, j'ai été invitée par la famille d'une amie à les accompagner pendant leur voyage en Turquie. L'acceptation fut compliquée pour mes parents, mais j'ai pu connaître mon premier Grand Voyage.

A 21 ans, j'avais donc, très sommairement, connu l'Espagne, l'Italie et la Turquie. Dix ans plus tard, avec mon mari, nous avons passé notre voyage de noces en Irlande, que nous avons fait découvrir en 2013 à nos enfants et mes parents. Puis, l'année de mes 40 ans, je me suis offert cinq jours à New York (le rêve de ma vie).

Cela ne reflète pas une vie de grande baroudeuse et, jusqu'à il n'y a pas très longtemps, je me sentais encore extrêmement frustrée de ne pas voyager davantage. L'avènement d'Instagram (dont je suis une grande utilisatrice) y contribue certainement, car les blogs de voyageurs y fleurissent, et l'incompréhension de ne pas pouvoir NOUS AUSSI mener notre road-trip en van dans le Montana ou en SUV de location en Islande me désarmait parfois.

Puis, cet hiver, nous avons eu la chance d'avoir un généreux cadeau financier de la part de ma belle-mère. Avec cette somme, nous avons décidé de nous offrir Londres et les studios Harry Potter, par l'intermédiaire d'un pack de la Brittany Ferries. Nous sommes partis quelques jours avant la rentrée.

Là, tout de suite, j'ai envie d'écrire que j'ai changé de paradigme. Mais je trouve ça quand même un peu fort, alors je vais nuancer mon propos.

Plusieurs éléments ont troublé ce voyage.

Mon mari refuse de prendre l'avion, c'est une phobie. Nous avons donc rejoint Ouistreham en voiture, puis nous avons fait la traversée jusqu'à Portsmouth. Là, nous avons pris le car jusqu'à Londres où nous avions notre hôtel. Idem pour le retour. C'est éprouvant, tous ces kilomètres. Mais cela a l'avantage de remettre une juste distance. Non, Londres ce n'est pas la porte à côté.

Quand on passe trois jours à Londres, il faut "profiter". Pas de temps mort. On marche, on prend le métro. On rentre le soir à son hôtel, harassé et crasseux, avec les oreilles qui bourdonnent et un mal de chien à se recentrer. Mais c'est pas grave, on a "profité". C'était "bien".

Nous nous sommes joyeusement assis sur nos efforts de consommation responsable. Non, non, la carte bleue n'a pas chauffé déraisonnablement. Et nous avions attribué un budget aux enfants en les mettant en garde contre les cochonneries. Non, ce qui m'a choqué, c'est le nombre de déchets que nous avons généré pendant ces cinq jours. Nous avons été grands consommateurs de street food, notamment le midi et lors des collations; et le soir, j'ai quand même remarqué que le jetable est érigé en religion dans beaucoup de restaurants.

Enfin, nous avons été fatigués, et paradoxalement pas forcément des parents bienveillants avec nos deux enfants. Nous les avons speedés, souvent houspillés et parfois sermonnés devant leur manque d'implication dans ce voyage. En fait, des fois, ils n'en n'avaient rien à faire.

Samedi, j'étais ravie de retrouver mon Home sweet home, et mon cadet aussi. Il me l'a dit. Je ne me suis jamais sentie à l'aise dans la position de "touriste". J'ai toujours eu l'impression d'être un prédateur, et souvent ces séjours me font changer de comportement : on mange mal, on consomme trop, on ne dort pas assez, on devient désagréable (et parfois on s'habille mal parce qu'on n'a pas ce qu'il faut dans la valise-_-). Les dernières expériences que j'ai eu, dans trois grandes villes de pays développés (Cork, New York et Londres) n'ont pas fait de moi quelqu'un de meilleur. Je dirais même que je me suis moins bien tenue à l'étranger que chez moi. Elles n'ont pas fait de moi quelqu'un de différent, j'ai juste rapporté de belles images.

Je suis atterrée. Je ne dis pas que je ne partirai plus. Mais mon envie de voyage en a prit un gros coup. Je ne m'explique pas cela, j'avais vraiment le sentiment d'avoir cette envie chevillée au corps.

Ma réflexion sur ce sujet n'est pas terminée. J'y reviendrai un jour très certainement.

Bien à toi.

1 commentaire:

  1. Ça me parle ce que tu écris là. Avec nos 3 jeunes enfants on ne part plus beaucoup en goguette pour de très courts jours, on a besoin de "s'installer" là où on va pour amener notre façon de vivre là où on voyage en quelque sorte.
    On est allé à Londres aussi il y a quelques semaines, en train. On est resté une grosse semaine, on avait loué une maison. C'est sur que ça permet plus de flâner, d'être moins dans une "rentabilité" du voyage qui fatigue tellement. On a pu cuisiner nos pique niques, amener notre rythme le plus physiologique possible de notre forêt même au milieu de la ville. Donc voilà la solution qui marche pour nous pour l'instant c'est de partir assez longtemps pour installer notre vie "comme à la maison", avec une machine à laver pour pouvoir partir le plus légers possible! Dans les mois années à venir on rêve d'un van... la maison partout! merci pour ce partage intéressant!

    RépondreSupprimer